« L’entreprise Altruiste – S’enrichir en donnant tout »

Published by Julia Peyron on

Isaac Geetz et Laurent Marbacher

Hier soir, je suis allée à une conférence, à Mouvaux près de Lille. Le thème c’était : Vivre l’économie autrement. Il y avait deux invités. Isaac Geetz, et Laurent Marbacher (c’est eux sur la photo). Ils présentaient leur nouveau livre : « L’entreprise altruiste ». Sous-titre : « S’enrichir en donnant tout ».

Isaac et Laurent – je vais m’autoriser à les appeler par leur prénom – ont passé 5 années à converser, explorer, faire des recherches et rencontres autour de ce sujet qui les a passionnés.

Dans notre monde actuel (pouvons-nous déjà le nommer « Vieux Monde » ?), majoritairement guidé par la recherche de profit et de rentabilité, des patrons différents semblent montrer un chemin autre.

C’est quoi une entreprise altruiste ?

Isaac et Laurent proposent cette définition de l’entreprise altruiste (je fais un mix de leurs mots et de mes mots) :

Une entreprise :

* dont toutes les activités de cœur de métier servent leur écosystème – clients, fournisseurs, communautés locales, jeunes, anciens détenant une forme de savoir et savoir-faire,

* et font ça de façon inconditionnelle,

* et grâce à cela, prospèrent.

Moi, ce que perçois dans ces façons nouvelles d’être un acteur de l’économie, c’est que l’amour inconditionnel commence franchement à s’immiscer dans le monde de l’entreprise, du « business »… Oh Yeah. C’est bon, ça. Ça me donne de l’espoir, et beaucoup d’enthousiasme et d’énergie pour continuer à co-construire le monde dans lequel j’ai envie de vivre. J’y crois à fond. Mais j’ai régulièrement besoin de me nourrir de narratifs comme celui-ci afin de poursuivre mon chemin, avec foi, fluidité et dans une résilience sereine. 

Isaac et Laurent ont voyagé sur 3 continents, à la rencontre de dizaines d’initiateurs de projet d’entreprises différents, nouveaux encore sur la planète que nous habitons.

J’ai été touchée par ces êtres humains que l’on m’a décrits, qui vont au bout de leur intuition, qui s’alignent avec leurs valeurs, avec une certaine radicalité. Pas de concessions. Etre soi. Et rayonner cela dans le monde.

Voici deux principes de l’entreprise altruiste que j’ai retenus :

1/ L’obliquité

L’obliquoi ? Ça veut dire : atteindre un objectif indirectement (ça vient du mot « oblique »). Autrement dit : on se focalise avant tout sur une intention et un objectif qui ont du sens et de la valeur pour nous. Puis, nous atteignons par effet rebond un résultat, une réussite plus concrète.

Laurent nous a donné l’exemple d’un entraîneur de l’équipe de basket de UCLA qui a concentré son travail sur le développement du potentiel des équipes, en s’intéressant aux personnes et à leur progrès. (Pas pour qu’ils marquent des paniers contre l’adversaire). Avec le temps, cette équipe est devenue ultra performante et reconnue.

Typiquement, dans le cas de l’entreprise altruiste, c’est miser sur la qualité de la relation, et non sur la transaction économique. C’est créer un lien tellement fort, grâce à la connexion authentique, qu’à partir de là, beaucoup devient possible.

Bref, c’est ne pas avoir d’attente fixe d’un retour sur investissement. C’est se focaliser, dans l’instant présent, sur la façon dont on peut nouer le lien avec ceux que l’on sert, avec intégrité. Puis, servir ces personnes qui viennent à nous, parce qu’elles ont un besoin, et que nous pouvons y répondre. C’est faire de notre mieux. Œuvrer à initier un cercle vertueux de soutien et de service, plus vaste et mystérieux.

Et avoir confiance que c’est en commençant par donner que nous recevrons. (Oui, ça demande du courage, et de la foi).

2/ Une perception du service client inconditionnelle, sans compromis

Issac nous a beaucoup parlé de Daniel Abittan, cofondateur (entre autres aventures) de Grand Optical.

Wahou. Ça m’a bluffée. Son discours et sa posture concernant la relation client sont clairement atypiques.

« Qu’est-ce qu’un client ? Quelqu’un qui te fait l’honneur de venir chez toi. La moindre des choses c’est alors l’hospitalité, c’est de l’accueillir. Puis il va demander quelque chose, car il a un besoin. Il est venu pour une transaction. Et moi, je vais créer avec lui une relation. (…) Je vais créer la richesse humaine. »

(Extrait du livre L’entreprise altruiste)

Dans ses boutiques, côté employés, il y a des affiches qui mentionnent : « Je vous donne tous les droits pour satisfaire nos clients, quel qu’en soit le coût et sans demander la permission à quiconque. » (What ? Really ?!).

Laurent et Isaac ont partagé des histoires relatant la façon dont des entreprises s’engageaient de façon altruiste, sans attente, sans focus sur leur rentabilité.

Simplement avec l’intention de servir, en faisant de leur mieux.

Des exemples qui m’ont marquée :

  • The FruitGuys et leur Directeur des Opérations qui va lui-même faire 5h de route pour livrer une cliente déçue. Avec les reviews qui s’ensuivent, en mode pure LOVE (c’est carrément too much, mais c’est super intéressant).
  • Staples qui remercie Isaac « Thank you for doing business with us » – le vendeur qui n’avait pas le produit dont avait besoin Isaac lui a conseillé d’aller chez le concurrent acheter un chargeur d’ordinateur d’une marque plus haut de gamme. Puis lui a remboursé la différence. (Euh, c’est le monde à l’envers ? Imaginez la relation client, la fidélité qui s’est établie, là).
  • LSDH, une entreprise française de lait et emballages, qui a créé (ou aidé à créer) une Maison des Routiers pour permettre aux chauffeurs de camions de se reposer et de prendre soin d’eux.

A l’origine de cela ? Des êtres humains qui s’écoutent, s’alignent, osent, créent.

Isaac nous a parlé du volet : « comment construire une entreprise altruiste ». Il a exprimé que le point commun de ces dirigeants, c’est qu’ils ont pris le temps de s’arrêter, de réfléchir – à qui ils étaient, à ce qu’ils voulaient profondément. Ils ont arrêté de s’adapter au monde extérieur et aux modèles existants. Ils ont décidé de pleinement s’aligner avec leurs valeurs. Et puis, ils ont créé un projet, et ont emmené d’autres personnes avec eux.

Isaac nous a montré une petite vidéo de Jacques Horovitz, confondateur de Chateauform’ (lieux de séminaires). Jacques Horovitz a mis ses convictions dans la création de l’organisation. Il a pris le contrepied de modèles existants qui ne lui convenaient pas (il a un côté assez rebelle !) : une gouvernance sans hiérarchie, pas de règles fixes, mais des relations fondées sur la confiance entre personnes qui partagent des valeurs, pas de gros siège social mais des petites unités où se prennent les décisions, un focus premier sur le retour des clients et l’énergie positive VS l’argent.

Côté service : la valeur de la générosité, de la simplicité, de la sincérité « même pour un instant ». L’accueil et la gentillesse. Il parle de « savoir donner avant de recevoir ».

On fait quoi de tout ça ?

Moi, ça m’a donné confiance dans le fait que notre monde bouge. Qu’il y a de plus en plus d’espace pour l’authenticité, l’intégrité, la qualité des relations dans les organisations. Le fait d’être guidé par le cœur et la confiance. Un nouveau paradigme s’installe. Ce n’est qu’une question de temps : ça ira plus ou moins vite, mais cela s’en vient. 

Les entreprises et organisations ont à évoluer parce que les êtres humains évoluent.

Nous sommes des êtres en mutation, dans un monde qui conserve les codes et le fonctionnement des siècles passés.

Mais tout cela se fissure – pour laisser apparaître plus de lumière.

Quand j’écoute, quand je regarde autour de moi, je suis témoin de tant de personnes qui doivent faire semblant, qui s’obligent à porter un masque, qui sont divisées entre le moi de leur vie privée et le masque professionnel, la carapace, l’« être qu’il faut être pour être acceptable et viable et en sécurité dans le monde ». J’observe aussi que cela devient de plus en plus difficile, de se forcer, de n’être pas vrai. Epuisement du faux et de l’effort. 

Ce que je ressens, c’est que la majorité des êtres humains veulent profondément la même chose : pouvoir être authentiques, laisser tomber leur armure, et rayonner fluidement qui ils sont.

Pour le moment, je vois à l’œuvre cette croyance commune que cela n’est pas encore possible.

Dans ce livre, dans ce discours qui nous montre une partie du monde, Isaac Getz et Laurent Marbacher mettent en lumière une façon de faire autre. Des personnes incarnent cela, d’ores et déjà. Commencer par être soi-même. Chacun d’entre nous, nous créons le monde dans lequel nous vivons. Il s’agit d’avancer petit pas par petit pas, et avec douceur avec nous-mêmes.

L’éclairage Coaching en Développement Intégral – des questions

Nous pouvons nous demander :

Qu’est-ce que ça veut dire pour moi « être au service » ?

Comment est-ce que j’utilise mes talents et ressources pour être utile aux autres ? Comment ai-je envie d’être généreux.se de mes talents ?

Quelle est ma façon de donner sans attente ? Si c’est ce que je désire – peut-être pas et c’est ok, parce qu’avant de prendre soin des autres, il s’agit d’abord de prendre soin de nous.

Si je voulais faire cela davantage (commencer à donner sans attente), ça ressemblerait à quoi ? Quel serait mon premier petit pas ?

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